De son vrai nom Meslien Ménir, Freem est en chansonnier créole, pilier de la culture carnavalesque. Après une période de retrait, il revient avec un répertoire inédit et un concept renouvelé.
Freem est connu pour ses envolées lyriques – parfois caustiques – et ses mascottes durant le carnaval de Martinique. Malgré lui, puisque la presse et donc le public le cantonneront à cette période festive et déguisée de l’année. Un piège, car le « voyé monté » prendra le pas sur l’esprit qui émaillait les paroles de ses succès. « Je n’ai par exemple jamais fait de chansons très « coquines », commente l’artiste. Pourtant Ali Bwa Bwa, mon plus grand succès passe pour une chanson osée. Il faut dire qu’avec les mascottes qui forment ma troupe et la « trépidence » du carnaval, on n’écoute pas les paroles. »
Alors, à force, sur la pointe des pieds, il s’est éclipsé il y a trois ans. Après plus de trente ans de succès. Comme il rappelle : « lè bal la pran fin, tout’ violon dan sak (à la fin du bal, on range les violons). Je me suis donc consacré à mon emploi dans un EHPAD de l’île. Et j’en ai profité pour organiser des animations culturelles dans ce milieu. C’est fou, comme on ne pense jamais au troisième âge pour les spectacles et les bals. Ce n’est pas comme si la Martinique n’était pas le territoire à la plus vieille population de France ? » C’est plus fort que lui, Freem glisse une pointe de causticité dans son discours ; ce qui lui a valu à l’époque le surnom de « Freem le poète à double sens ». En fait, le drame de Freem vient de l’anticonformisme fondamental de Meslien Ménir. Ses amis disent de lui : « Freem ne fait rien comme personne. »
Ainsi, le succès venant, beaucoup d’artistes ouvrent un magasin ; « pour se placer et s’embourgeoiser. » Hé bien, lui a fait l’inverse, puisqu’il a débuté avec un magasin de vêtements au rez-de-chaussée du centre commercial de Place d’Armes dans la commune du Lamentin. A l’époque, il profitera de la période carnavalesque, pour mettre en scène ses Mascottes, personnages du bestiaire créole qui l’accompagneront durant ses spectacles. Le succès est immédiat. Mais l’équivoque s’installe : Est-il un artiste commerçant ou un commerçant qui se distrait en poussant la sérénade ?
Et puis, si son nom de scène est puisé dans le vocabulaire créole (la « frime »), il ne faut pas oublier que le nom de FREEM est celui d’un équipementier automobile national ; installé et c’est un comble, en Martinique. Freem baisse donc le rideau du magasin de Meslien Ménir. Avec d’autant plus de facilité que l’homme prépare un brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport au Centre Emma Ventura. Il ne le sait pas encore, mais il vient d’aborder un nouveau carrefour de son histoire : l’animation culturelle dans les centres de séjour médicalisés. Aujourd’hui encore, il est l’employé d’un de ces centres, réservés au troisième âge. Il y a un grand succès ; à son corps défendant, pourrait-on dire : « J’organise bénévolement des animations, des spectacles faits par des artistes locaux. Et c’est le centre qui en retire toute la gloire » marmonne-t-il sous sa casquette.
Alors… Vous connaissez déjà la suite. Sur la pointe des pieds, il va se retirer et monter SA structure d’animation culturelle et artistique : avec comme clientèle, les EHPAD, les écoles et les centres de séjour. Du coup, il a augmenté le nombre de ses mascottes. Et a étoffé son répertoire. Mais là, il réserve la surprise à son public.
Auteur : Éric Hersilie-Héloïse