On ne va pas se mentir, aux Antilles françaises on est un peu chauvin (à raison) et on ne jure que par le rhum agricole pur jus de canne, considérant que les rhums de mélasses sont l’apanage des régions hispaniques et anglaises, mais saviez-vous qu’avant le rhum pur jus de canne, nous produisions principalement du rhum de mélasses ?
Avant toute chose un petit point sur les différentes catégories de rhums s’impose. En effet, il existe dans le monde 3 grands types de rhums dont l’appellation dépend de la matière première utilisée pour le produire : Les rhums de mêlasses, aussi appelés rhums traditionnels, rhums industriels ou rhums de sucrerie ; Les rhums agricoles ou purs jus de canne ; Les rhums de miels de canne. Le miel canne étant une réduction de jus de canne à sucre, se rapprochant du sirop batterie.
Pour comprendre un peu l’histoire du rhum il faut partir de l’histoire du sucre de canne. En effet, à la découverte des îles, les pays colonisateurs cherchent à exploiter ces terres fertiles. De son côté, la canne à sucre, le « roseau qui donne du miel sans le recours des abeilles », découverte en Papouasie-Nouvelle-Guinée, suscite beaucoup d’intérêt mais reste difficilement exploitable en Europe où elle appauvrit les sols. Dès la fin du XVe siècle, Christophe Colomb l’apporte donc dans les îles où elle rencontre les conditions idéales pour croître. Les raffineries se développent alors rapidement et le sucre devient la première denrée coloniale, avec malheureusement la triste histoire humaine qui en découle. En effet, la production de sucre exigeait beaucoup de main d’œuvre et servait également de principale monnaie d’échange dans ce commerce triangulaire.
Le sucre de canne est produit par cristallisation du jus de canne, mais durant ce processus une partie ne cristallise pas : c’est la mélasse. Cette dernière, considérée comme un « déchet » sert dans un premier temps à nourrir le bétail. Toutefois il reste du sucre dans cette matière et dès qu’il y a du sucre il peut y avoir de l’alcool : le rhum de mélasse est né !
La canne à sucre devient alors l’or des Antilles françaises et le rhum qui en découle permet de valoriser ce « déchet » de l’industrie sucrière. La Guadeloupe a compté près de 11 usines principales et plus de 400 sucreries, c’est dire la puissance de cette industrie. A l’époque il est inenvisageable d’utiliser le jus de canne directement pour produire du rhum, qui reste une production de second rang.
Le rhum originel est donc de mélasse, vous comprendrez ainsi pourquoi on l’appelle aussi rhum « traditionnel » ; un petit nom plus doux et vendeur que « rhum industriel » ou « rhum de sucrerie ».
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*L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ; à consommer avec modération
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