Rhum, rum, ron… mais d’où viennent ces appellations ? Victoria Payen, notre spécialiste des délices de la Caraïbe, revient sur la genèse d’une boisson phare des grandes et petites Antilles.
Au XVIIe siècle, une curieuse superstition régnait aux Antilles: on attribuait au rhum le pouvoir de chasser les démons ! En référence à cette croyance le rhum portait alors le nom de « kill-devil » (littéralement « tue-diable »). Au départ, le rhum est produit principalement sur l’île anglaise de la Barbade ; c’est une boisson terrifiante, au degré d’alcool non maitrisé, épaisse et trouble, à laquelle seuls les esclaves, les pauvres et les marins osent toucher. Peu à peu, une nouvelle appellation voit le jour à propos de cette boisson alcoolisée : On entend parler de « guildive », dérivée créole de « kill-devil ». Dans les îles françaises, le rhum porte le nom de « tafia ». Un nom donné par les esclaves, sans doute d’origine africaine. On dit aussi des esclaves qu’ « Ils aiment fort l’eau-de-vie, qu’ils appellent du brusle-ventre ».
Le rhum n’en est qu’à ses débuts et porte déjà trois appellations différentes… mais il enivre et petit à petit… Au-delà de chasser le démon et de bruler le ventre, il provoque la bagarre prenant peu à peu le nom de « rumbullion » ou « rumbustion » qui désigne « une bagarre » dans un dialecte anglais. Il semblerait finalement que ce soit au XVIIIe siècle que « rumbullion » soit abrégé en « rum » dans les îles anglaises.
Certains disent que le nom de « rum » pourrait aussi venir de l’abréviation de saccharum, qui est le nom savant de la canne à sucre en latin. Mais, qu’on se le dise, cette explication est bien moins distrayante. Quoi qu’il en soit cela donna « rhum » en Français sans que l’on sache vraiment à quel moment est apparu ce « h », si peu courant dans la langue française. Mystère…
On peut néanmoins soupçonner qu’il était question de se démarquer du rival héréditaire, l’Angleterre. Les Espagnols quant à eux transformèrent « rum » en « ron ».
De nos jours, seuls demeurent les termes « rhum », « rum » et « ron ». Le « rhum » désignant l’eau-de-vie de canne à sucre d’origine française (Martinique, la Guadeloupe et Marie-Galante notamment). Le « rum » désignant celle d’origine anglaise (Barbade ou Jamaïque par exemple). Enfin celui de « ron » désignant celle d’origine hispanique (Puerto-Rico, Cuba ou encore Saint-Domingue). Regardez bien vos bouteilles, vous aurez un petit indice sur l’origine de votre breuvage selon la manière dont est écrit rhum. Nous avons toutefois déjà relevé des « ron » écrits « rum », sans doute pour des questions marketing ; vérifiez donc tout de même l’origine sur les étiquettes: par exemple, le « flor de caña » est produit au Nicaragua mais sur les bouteilles vendues en France il est indiqué « rum »» et non « ron »…
*L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ; à consommer avec modération
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Victoria Payen sur : www.lacasestbarth.com