Chaque année, le Prix Jeunes Talents L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science récompense des chercheuses « pour leur parcours émérite et leurs travaux brillants ». Deux post-doctorantes de Martinique en ont été honorées.
35 RECOMPENSEES ~ Elles étaient 686 en France à se porter candidate au prix remis chaque année par La Fondation L’Oréal aux côtés de l’Organisation des Nations unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO). In fine, 20 doctorantes et 15 post-doctorantes ont été récompensées par les membres du jury de sélection de l’Académie des sciences pour le cru 2020. Parmi elles, Aurélie Boisnoir et Jordane Corbeau, toutes deux chercheuses en Martinique. La première a pour sujet les microalgues qui peuplent la Mer des Caraïbes ; la seconde, l’activité sismique de la frontière de la plaque Caraïbe (voir article suivant).
SOUS-REPRESENTATION DES FEMMES ~ Depuis sa création en 1998, le programme L’Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science a soutenu plus de 3 000 femmes. « On ne compte que 36 % de femmes en doctorat, 26 % en écoles d’ingénieurs et 26 % parmi les chercheurs. En Europe, seulement 11 % des hautes fonctions académiques en science sont exercées par des femmes », regrette Alexandra Palt la Directrice Générale de la Fondation L’Oréal. Cette sous-représentation a « un impact concret, » soulignent les organisateurs du prix : « le manque de mixité dans la recherche médicale sur la santé des femmes a conduit à leur moins bonne prise en charge lors du développement de maladies cardiovasculaires. Même constat du côté de l’intelligence artificielle, comme ces algorithmes qui reproduisent des stéréotypes de genre, car conçus par et pour servir des hommes ».
FINANCEMENT ET FORMATION ~ Les chercheuses primées recevront une bourse de recherche d’un montant de 15 000 euros pour les doctorantes et 20 000 euros pour les post-doctorantes. Elles bénéficieront aussi d’un programme de formation au leadership, complémentaire à leur parcours scientifique, afin d’avoir les moyens, rappelle la Fondation, « de briser plus facilement le plafond de verre ».
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AURELIE BOISNOIR, DES SOLUTIONS POUR LA MER DES CARAÏBES ~ Aurélie BOISNOIR réalise un postdoctorat à l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer) sous la direction de Nicolas Chomérat et Jean-Pierre Allenou. Ses travaux ambitionnent de faire avancer la recherche sur les « dinoflagellés » benthiques toxiques – des microalgues présentes dans la mer des Caraïbes qui engendrent des problèmes sanitaires (intoxications alimentaires notamment) et économiques. Mal connus, peu d’études récentes se seraient intéressées à leur identification génétique ou à la caractérisation de leurs toxines. C’est chose faite avec les travaux d’Aurélie Boisnoir qui compte bien trouver des solutions. À travers le programme Pour les Femmes et la Science, la chercheuse souhaite susciter des vocations chez les jeunes ultramarins, « afin qu’ils prennent conscience de la richesse des écosystèmes qui les entourent et de la nécessité de les étudier pour mieux les connaître, et donc, de les préserver ». Inspirée dans son parcours par des femmes, Aurélie BOISNOIR constate que les cursus scientifiques « ont du mal à susciter des vocations chez les femmes, pour des raisons telles que la durée des études, la précarisation de l’emploi en début de carrière, ou la mobilité imposée entre les contrats ». Pourtant, dit-elle, « l’audace et la ténacité sont des atouts féminins adaptés aux carrières scientifiques ». Sa philosophie : « les échecs et les rencontres permettent de construire l’esprit du scientifique ».
Crédit photo: Fondation L’Oréal – L’UNESCO
JORDANE CORNEAU, PREDIRE TOUJOURS MIEUX LES SEISMES ~
« La science est une discipline collaborative qui se doit d’adopter une vision du monde toujours plus globale et complète », estime Jordane Corbeau, passionnée de sciences de la vie et de la terre et consacrée aux géosciences. Elle s’est spécialisée en géophysique et en sismologie. Dans le cadre de ses travaux de thèse, elle a découvert la région des Caraïbes, s’intéressant particulièrement à Haïti après le tremblement de terre de janvier 2010. Elle mène ses recherches sur la dynamique des frontières de plaques tectoniques. À la suite de son doctorat, elle intègre l’Observatoire Volcanologique et Sismologique de Martinique où elle poursuit ses recherches sur l’activité sismique de la frontière de la plaque Caraïbe. Elle analyse les catalogues de la sismicité dans le temps et dans l’espace afin de détecter des signes potentiels précurseurs d’une rupture sismique majeure, dans le but d’améliorer l’aléa sismique pour la région des Petites Antilles. À terme, son objectif est « d’utiliser des techniques d’intelligence artificielle pour traiter des milliers d’enregistrements sismiques et faire ressortir des signes précurseurs de ruptures qui pourraient échapper au regard humain ».
Crédit photo: Fondation L’Oréal – UNESCO